jeudi 20 janvier 2011

A qui le tour ?

Sur l'imprévisible et si belle révolution de la jeunesse tunisienne contre la dictature tout reste à dire. Décembre 2010 janvier la victoire reste incomplète. Les loups déguisés en agnelets tiennent encore les rênes du pouvoir par le biais d'un fidèle vassal du gang Ben Ali. Les mercenaires qui avaient confisqué la citoyenneté avec le soutien de l'Occident civilisé resteront longtemps embusqués pour récupérer la colère populaire.
La vigilance s'impose plus que jamais. La fuite de Zine El Abidine en Arabie Saoudite ne doit être appréhendée qu'une étape vers la victoire. La tentative de coup d'Etat, le 15 janvier 2011, de Mohamed Gannouchi qui avait prétendu que le dictateur l'avait chargé de l'intérim avant de partir est une preuve que le fuyard avait essayé de placer ses pions en prévision d'un éventuel retour une fois le calme revenu. Fort heureusement que le coup d'Etat a été avorté par la poursuite des manifestations. Mais Mohamed Gannouchi demeure l'innamovible premier ministre d'un gouvernement de transistion d'où ont été exclus les opposants qui ne sont jamais compromis avec le régime Ben Ali.
C'est un grand danger pour la révolution des citoyens libres, pour paraphraser le bouillant Attouane Abdelberi.
Cependant nous sommes tenus de reconnaître que la jeunesse tunisienne a donné le coup d'envoi à un large mouvement de protestation dans plusieurs pays arabes contre les Etats policiers et affameurs. Si l'un des plus férocement démonstratifs dictateur de l'histoire a hissé le drapeau blanc au bout de 25 jours de confrontation c'est le signe que ses pairs essayeront de résister plus longtemps que lui mais finiront par céder. Les jeunes en Egypte, en Syrie, en Algérie, en lybie, au Maroc, en Jordanie, en Irak, au Yemen y croient très fort. Ils ne cherchent la confrontation que parce que tous les canaux du dialogue constructif sont entravés par les dictateurs.
Nous irons avec eux au charbon en espérant que les balles des mercenaires épargneront les jeunes grâce à nos corps déglingués. D'autant plus que rares sont les armées du monde arabe qui peuvent se vanter d'avoir des généraux patriotes comme Rachid Ammar qui a démissionné pour ne pas être forcé d'assassiner des citoyens qui réclament liberté, justice, travail, logement.
Pour immortaliser mes premières impressions en tant que Maghrébin et Arabe végétant sous un
régime archaïque j'évoquerai trois scènes très significatives, selon mon humble avis.
Première scène:
Une chambre d'hôpital. Mohamed Bouazizi, enroulé dans le pansement de la tête aux pieds, est étendu sur le lit. En face de lui des médecins et Zine El Abidine Ben Ali blême, le regard fuyant, embarrassé. Bouazizi c'est le marchand ambulant dont le suicide a embrasé la Tunisie. Son geste a abouti à la chute du dictateur.
Deuxième scène:
Un agent de sécurité en civil poursuit un jeune manifestant. Il le rattrape, l'étale par terre d'un croche-pied, lui assène un coup de poing à la poitrine et le piétine. En ce moment arrivent en courant quatre ou cinq agents de sécurité en uniforme et lourdement armés. A coups de matraques et de pieds ils s'acharnent sur le jeune homme étendu à même le sol, sans défense. Violence inutile, gratuite et combien déshonorante pour des fonctionnaires de l'Etat qui sont au service du citoyen. Se mettre à cinq pour tabasser un enfant en sachant que la scène est filmée et sera diffusée dans le monde entier. Je pense que c'est un message de la dictature aux citoyens: la force et le droit c'est nous.
Troisième scène:
A Tunis, devant le siège du ministère de l'intérieur, s'est réunie une grosse foule pour réclamer le départ des ministres de Ben Ali. Une barrière est dressée pour empêcher les manifestants d'envahir les bâtiments et des soldats en tenue de parachutistes chargés de protéger les lieux se tiennent entre la barrière et le siège ministériel. L'intention des manifestants est clairement affichée. Cependant aucune violence ni d'un côté ni de l'autre. Vif échange verbal entre les militaires et les civils. Dialogue ou altercation? Soudain un soldat et un manifestant se serrent la main et les lèvent en l'air en signe d'entente. Juste à côté un autre soldat embrasse un manifestant.
A SUIVRE

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